Aller doucement pour progresser

Evite le no pain no gain !

Bon nombre de pratiquants de sport d’endurance ont du mal à saisir l’importance de l’endurance fondamentale. Ils considèrent que plus l’entraînement est difficile, plus il est efficace pour progresser : la règle du no pain, no gain. Une grande majorité de leurs séances se déroulent à un rythme tempo continu, sans inclure suffisamment de travail en endurance de base ou au contraire de travail fractionné à plus haute intensité.

Attention aux allures tempo

Le tempo correspond à la zone 3 dans un modèle en 5 zones. C’est une intensité modérée à soutenue, mais durable sur le moyen à long terme. Il s’agit des allures de courses semi-longues à longues, comme les semi-marathons, marathons et cyclosportives de 2 à 4 heures. Les pratiquants ont tendance à abuser de cette intensité d’entrainement pourtant moins favorable à la progression.

L’intérêt du modèle polarisé

En effet, de nombreux travaux de recherches ont démontré l’intérêt du travail en endurance fondamentale couplé à des séances fractionnées à plus haute intensité pour progresser (voir article sur les clés de la progression et les grands modèles d’entrainement).

Le graphique ci-dessous est tiré de l’étude de Solli et al. (2017) qui illustre la répartition des intensités d’entrainement de la skieuse de fonds la plus médaillé de l’histoire. Il est remarquable de constater que l’énorme majorité de ses entrainements est réalisée dans le vert. Cette intensité correspond à son endurance de base (LIT = Low Intesity Training, entrainement à basse intensité). Une partie de ses entrainements comporte du travail à haute intensité (zone rouge) représentant des séances de fractionnées plus ou moins longues. Des séances de vitesse et de force complètent le total. Le travail tempo (rythme modéré) symbolisé par la partie jaune sur le graphique, est peu présent. Il y en a, certes, mais cela représente une part négligeable du volume total.  

Par ailleurs, les années les plus fructueuses en termes de victoires étaient celles entre 2010 et 2015 (colonnes encadrées) comportant le plus haut volume d’entrainement total (plus de 900h d’entrainement par année) et le plus de travail à basse intensité.

Take home message

L’objectif n’est évidemment pas de s’entraîner comme les pros. Toutefois, des observations intéressantes peuvent être dressées et appliquées :

  • Le travail à basse intensité est nécessaire pour accumuler du volume et optimiser ton utilisation des graisses durant l’effort. Il devrait représenter la majorité de ton volume d’entraînement total (entre 75 à 80% du volume total).
  •  Le travail fractionné à haute intensité permet d’améliorer ton niveau d’endurance général et les paramètres physiologiques maximaux de la performance : VO2max, augmentation des seuils, paramètres neuromusculaires, augmentation de la tolérance à la douleur, etc. Le nombre de séances à haute intensité dépend de ta fréquence d’entraînement, de ton historique, de ton objectif. Une à deux séances par semaine sont suffisantes dans une grande majorité des cas.
  • Le travail en zone tempo ou plus globalement le rythme compétitif de course mi-longues à longues est intéressant à l’approche des compétitions pour familiariser le corps. Cependant, ce type d’intensité (MIT = Moderate Intensity Training = intensité modérée) ne devrait pas représenter la majorité du volume d’entraînement tout au long de la saison.

Progresser en fonction des objectifs

Il est important de noter que les recommandations en matière d’entraînement dépendent du contexte, du niveau d’entraînement de chaque personne, de ses objectifs, de sa fréquence d’entraînement hebdomadaire, etc.

Si tu es débutant et que tu pars de zéro, tu constateras des progrès simplement en te mettant au sport et en t’entraînant régulièrement. Cependant, lorsque ta fréquence d’entraînement augmente (à partir de 3 à 4 entraînements par semaine), que tu as des objectifs compétitifs et que tu souhaites optimiser tes séances, une bonne planification et une répartition équilibrée des intensités sont essentielles pour atteindre tes objectifs et progresser.

Ne crains pas de ralentir, d’aller doucement et de profiter de tes entraînements en endurance de base. L’énergie que tu économises lors de ces entraînements peut être dépensée durant tes séances de fractionné à intensité plus élevée. Ne cherche pas à battre ton record personnel ou à remporter tous les KOM (pour les utilisateurs de Strava) à chaque entraînement, tu n’en sortiras pas gagnant sur le moyen-long terme. « Qui va piano, va sano. »

Références

Kenneally, M, Casado, A, Santos-Concejero, J. (2018). The Effect of Periodization and Training Intensity Distribution on Middle- and Long-Distance Running Performance: A Systematic Review. Int J Sports Physiol Perform. Oct 1;13(9):1114-1121.

Seiler, S. (2016). Seiler’s Hierarchy of Endurance Training Needs. DOI:10.13140/RG.2.2.16667.05924.

Solli, GS, Tonnessen, E, Sandbakk, O. (2017). The Training Characteristics of the World’s Most Successful Female Cross-Country Skier. Front. Physiol., 18 December 2017. Sec. Exercice Physiology, Volume8. doi.org/10.3389/fphys.2017.01069

À propos de l'auteur

Jonas Darbellay

CEO et fondateur

Triathlète, physiologiste de l’effort et préparateur physique, expert dans l’analyse et le traitement des datas d’entrainement.

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